Origines des armoiries
En 1696, un édit de Louis XIV institue une grande maîtrise, sorte de cour héraldique dont la mission était de rédiger un armorial général de la France en enregistrant, après vérification, les armoiries de toutes les personnes de la noblesse ou de la bourgeoisie et de toutes les collectivités, provinces, villes, villages, communautés religieuses, corporations…
Cette Maîtrise, présidée par M. d’Hozier, délivra aux intéressés des brevets sur lesquels figurait, en dehors du dessin colorié des blasons, la description détaillée de ces armoiries; ces brevets n’étaient délivrés que contre paiement d’une certaine taxe fixée selon le rang du demandeur. On demandait pour un particulier 20 livres, 100 livres pour une ville épiscopale, 50 livres pour un évêché ou les abbayes et 25 livres pour un village. En Alsace, l’enregistrement des armoiries, achevé en 1704, a rapporté 103 638 livres.
La communauté de Lutterbach avait recours au XVIIe siècle, pour le scellement d’actes, au sceau du grand cellérier de Lucelle à Lutterbach. Les commissaires généraux chargés de l’établissement de l’armorial général transformèrent l’image figurant sur ce sceau : une Vierge à l’enfant Jésus, assise sur le toit d’une église, en armoiries de Lutterbach. Ce blason fut enregistré le 24 juillet 1699 sous le n°216, au deuxième registre de la maîtrise de Brisach, mais le village utilisa rarement cet emblème d’une complication peu héraldique.
Trois ou quatre clés
En 1790, la Constituante abolit les armoiries, Napoléon les rétablit et par ordonnance du 26 septembre 1814, Louis XVIII prescrivit que les villes et les villages de France dussent reprendre leurs anciennes armoiries. De toute façon, les habitants de Lutterbach prirent, dès le début du XIXe siècle, pour emblème trois clés posées en pal, le panneton haut. Ils s’inspiraient, mais en supprimant toutefois la clé du quart de gauche du haut de l’écu, des armoiries des nobles de Montjoie (Frohberg) représentées sur une pierre gravée du XVIIe siècle et qui était scellée au-dessus de la porte d’entrée de la cave de l’ancienne mairie. Cette pierre, récupérée par le menuisier Jacques Werlin lors de la construction de sa maison en 1904, est toujours conservée. Elle est visible sur la façade, entre les deux fenêtres du premier étage, de la maison N°34, rue Aristide Briand.
Au XVIIe siècle, le droit d’avouerie sur la cour domaniale de Lucelle dans notre village revenait aux nobles de Montjoie. Signalons qu’au XIXe siècle, les anciennes armoiries de Lutterbach (avec la Vierge à l’enfant Jésus) furent attribuées par erreur à la commune de Lautenbach. Même les armoiries aux trois clés furent souvent mal interprétées ou mal représentées. Les erreurs ont pu ainsi se perpétuer jusqu’à nos jours. Ainsi, la paroisse de Lutterbach avait toujours fait reproduire simultanément les anciennes et les nouvelles armoiries sur les bannières et attributs de la basilique.
Les armoiries officielles
La commission d’héraldique du Haut-Rhin se prononça, en 1979, pour la modification du blason actuel de Lutterbach comportant deux métaux. L’emploi de deux métaux – or et argent – n’est pas justifié en héraldique.
La bonne solution consiste à employer un métal et un émail (couleur). Cette commission proposa l’emploi d’argent et de gueules. Ces couleurs rappelleront celles qui figuraient sur une bande échiquetée de deux traits des anciennes armoiries de la localité. Une pierre borne, représentant une bande échiquetée et entourée des lettres L et B du nom de la localité, a été trouvée dans la commune, il y a une dizaine d’années et récupérée par un particulier. Pour la forme des clés, on s’est inspiré d’une grande clé, datant du XIIIe siècle, trouvée au cimetière du village il y a quelques décennies.
La commission d’héraldique du Haut-Rhin a établi la description des armoiries de la manière suivante : « Ecartelé, au premier de gueules plain, au quatrième de gueules à la clé d’argent, le panneton haut tourné dextre, aux deuxième et troisième d’argent à la clé de gueule le panneton haut tourné à sénestre ». Ces armoiries ont été adoptées à l’unanimité par le Conseil Municipal en date du 10 octobre 1979.